Hybridation. De l'hétérosis à l'hybris
Hybridation. De l’hétérosis à l’hybris
Journée d’étude interdisciplinaire (en ligne)
Université Toulouse Jean Jaurès, LARA-SEPPIA
Lundi 10 mai 2021
Le terme hybride a investi l’ensemble des sphères des arts, des sciences et des technologies et revêt des significations variées. Figure de la complexité, de l’antiquité (chimères gorgones, griffons…) à l’époque contemporaine, l’hybride est aujourd’hui confronté aux techniques actuelles qui permettent la manipulation du vivant (prothèses, greffes, clonage, manipulations génétiques, implants, transgénèses…).
L’hybride, du latin hybrida(de sang mélangé)[1], est la descendance de deux individus génétiquement éloignés ; c’est ce « qui provient du croisement naturel ou artificiel de deux individus d’espèces, de races ou de variétés différentes. »[2]Dans une perspective d’amélioration des espèces vivantes, par l’exploitation de certaines qualités de ces individus et de la bonne combinaison de leurs génomes, l’hybride qui en ressort possède une puissance accrue appelée Hétérosis.
La notion d’hybridation, qui relève du processus, renvoie à l’idée de transgression, à celles d’impureté (hybrida, c’est aussi le bâtard)[3], de contamination, d’aberrations physiologiques, d’anormalité, voire de monstruosité. Mais aussi à celles de performance, de rendement. C’est en ce sens que le corps humain est envisagé comme étant perfectible (mutant, trans- et posthumain, cyborg…), d’autant plus dans un contexte politico-socio-économique qui valorise la perfection et l’excellence. S’affranchir de son corps biologique et transcender sa finitude, c’est épouser la démesure de l’hybris,la volonté de dépasser les limites de la condition humaine que condamnaient les dieux dans la mythologie grecque.
L’hybridation semble abolir les frontières, et sans pour autant essentialiser les individus, effacer les appartenances à quelque genre, quelque type que ce soit. Elle relève du mélange, de l’entrelacement, de l’intrication. En ce sens, les gènes font écho au code informatique et l’hybride des mutations écologiques au numérique qui ne relève pas « de l’art du collage, du mélange, du patchwork, qui ne procèderait que par juxtaposition, par insertion ou incrustation à partir de fragments de réel, mais [d’]un art qui opère dans la trame, la structure, la connaissance même du réel […] au plus profond de leurs relations et de leurs intrications, un art qui les associe organiquement, génétiquement, dans ce qu’ils ont de plus totalement étranger. »[4]
Aujourd’hui, les artistes nous confrontent aux questions complexes de société liées aux (bio)technologies où perspectives de progrès s’affrontent aux questions éthiques, écologiques et politiques. Ils ont aussi le pouvoir d’agir sur la vie, d’expérimenter le vivant, de créer du semi-vivant dans des laboratoires. Ils ont cette faculté créatrice de jouer de la transgression et de créer un monde de possibles et d’anticiper sur des réels à advenir.
Sélective et eugéniste, l’hybridation relève-t-elle de l’effet de mode, d’une nouvelle norme ?
Quel est le devenir du vivant ? Les biotechnologies et plus singulièrement la génétique soulignent les similitudes de toutes les vies, qu’elles relèvent de l’homme, des plantes et des animaux, et remettent en cause l’étanchéité de la barrière qui semble exister entre les espèces. De fait, sur ces bases, lorsque nous nous retournons contre notre environnement, l’exploitons à outrance ou sans précaution, lorsque nous l’épuisons, sans souci du lendemain, n’est pas contre nous même que nous nous retournons ?Ou comment la vision anthropocentrée et consumériste du monde, véhiculée par les idéologies dominantes, peut-elle porter atteinte à la biodiversité ?
Quelle relation entre le risque et le bénéfice ? L’hybridation, dans le processus de ses métamorphoses, n’est-elle pas aussi une condition de la vie et un moteur de son évolution ?
[1]CNRTL, https://www.cnrtl.fr/definitio...
[2]Ibid.
[3]Ibid.
[4]Edmond Couchot, « Une marge étroite mais fertile… », La Revue virtuelle n° 1, 15 avril 1992, Actualité du virtuel, CD-ROM, Paris, MNAM – CCI - Centre Georges Pompidou, 1996.
Programme
10h30
Visages et inter-Faces Homme-machines :Tradition et cybergologie en bioprothèse maxillo-faciale.
Florent Destruhaut, MCF, MCU-PH, CHU Rangueil, URU Evolsan
Débat
11h Hybridation et capabilité : le handicap comme vecteur d’émancipation
Jean-Michel Caire, Ergothérapeuthe, Hôpitaux de Toulouse
Débat
11h30 Ce vivant qui s’hybride en moi : Viralité ou vivacité ?
Bernard Andrieu, Philosophe, Professeur des Universités, Paris-Descartes, CNRS/URP3625 I3SP, associé à UMR 6578
Débat
Pause
14h L’hybridation et la création de l’art olfactif
Jing Fang, Doctorante en arts plastiques, LARA-SEPPIA
Débat
14h30
Judith Nicogossian, anthropobiologiste, anthropologie de la santé, Faculté de médecine de la méditerranée, CNRS/UMR 6578
Débat
15h L’épaisseur de l’hybride
Xavier Lambert, Professeur émérite des universités, LARA-SEPPIA
Débat
15h30 La magie de l’hybride dansant
Carole Hoffmann, MCF HDR en arts plastiques, LARA-SEPPPIA
Débat
Inscriptions : https://univ-tlse2.zoom.us/web...
De 10:30 à 16:30