Une nouvelle voie pour relier l’homme à la biosphère, la coviabilité socio-écologique
Publié par IRD Occitanie, le 7 mai 2021 1.1k
Le Belmont Forum et ses partenaires*, dans le cadre de l’appel à projets Pathways for Sustainability, finance le projet COVPATH – Coviability Path, a new framework to sustainably link mankind and biosphere. Cette initiative propose une nouvelle voie transversale dans l’agenda du développement durable qui réintègre l’homme dans le monde vivant autour de la santé partagée.
Olivier Barrière, IRD, chercheur à l’UMR Espace-Dev, porteur du projet, répond à nos questions.
Quels sont les enjeux de ce projet ?
Le projet COVPATH, dans sa première phase de 2 ans, est une démarche collective** qui cherche à définir une nouvelle voie d’existence des sociétés modernes face à l’urgence écologique : (i) sortir du naturalisme? et de la séparation homme/nature pour penser différemment la relation des humains aux non-humains (ii) réviser la relation au vivant en s’inspirant des ontologies? relationnelles des peuples autochtones et des communautés locales. Il s’agit ici de développer le concept de coviabilité socio-écologique, définie comme une interdépendance des humains au vivant et qui résulte des interactions entre systèmes humains et non-humains dans un cadre de viabilité mutuelle. La voie de la coviabilité se présente comme un état plutôt qu’un processus de « développement ». Elle constitue un nouveau paradigme d’ordre social, économique, politique, juridique et scientifique, dans une perspective d’existence durable des sociétés humaines (modernes).
Quelle en est l’originalité ?
Le raisonnement part du défi de métamorphoser la relation entre les humains et le vivant, en laissant la question d'un "environnement" (ce qui entoure les sociétés) pour adopter l'idée de continuité entre les humains et les autres entités vivantes. Au sein des organismes vivants, les réseaux d'interactions forment en effet un entrelacement exprimant des interconnexions qui définissent un ensemble, collectif, fondé sur une santé commune (humains et non-humains). Ainsi, l’idée est d’associer les sociosystèmes aux écosystèmes sans les dissocier et donc dépasser l’analyse du socio-écosystème pour une relation humain/non-humain en termes de viabilité. Dans ce cadre, alors que le monde de la recherche s’associe aux gestionnaires et acteurs du territoire, une diversité de disciplines a aussi toute sa place : droit, économie/bio-économie, écologie, biologie, modélisation, santé, géographie, télédétection, anthropologie, philosophie. Concrètement, ce projet constitue la première phase d’un processus menant à l’expérimentation de pacte de territoire pour une intendance territoriale? (land steawardship). Cette phase est la constitution d’un consortium international prenant appui sur 6 terrains? qui sont des réserves de biosphère, en partenariat avec l’Unesco-Mab.
Sur quelles connaissances antérieures votre équipe s’appuie-t-elle ?
Notre équipe s’appuie sur des premiers travaux partant de (i) recherche en mathématiques sur la viabilité et (ii) recherches de terrain sur la gouvernance et la régulation d’accès aux ressources naturelles. Un ouvrage sur la coviabilité Coviability of Social and Ecological Systems: Reconnecting Mankind to the Biosphere in an Era of Global Change a été publié en 2019. Il rassemble une centaine de chercheurs de disciplines différentes autour du concept de coviabilité socio-écologique et a posé un cadre collaboratif autour du projet.
Quels sont les résultats attendus ?
Dans un premier temps, les résultats attendus s’articulent autour de la consolidation d’un consortium partant d’une cinquantaine de chercheurs, gestionnaires et acteurs locaux, associé à l’animation du réseau. Cette première phase doit nous conduire à une seconde phase plus opérationnelle encore, permettant la mise en place d’un protocole de recherche-action autour de la co-construction de pactes territoriaux, comme intendance territoriale. L’idée sera enfin d’aboutir à une définition endogène?, co-construite de la coviabilité socio-écologique et d’envisager des stratégies et scénarios dans le but de préparer un guide sur les interactions humains/non-humains.
En quoi votre recherche répond-elle à la science de la durabilité ?
L’idée essentielle est d’aboutir à une science des solutions. On ne tombe pas dans la collapsologie / l’effondrement mais on souhaite développer une science constructive en proposant et mettant en œuvre une nouvelle voie pour les sociétés modernes qui sont à même de repenser/réviser leur « développement » pour raisonner en termes de « viabilité ». Devant la finitude de la planète le projet propose de co-construire et opérationnaliser la viabilité des systèmes socio-écologiques, partant d’un concept interdisciplinaire et multi échelle, pour le mettre en œuvre par une relocalisation des modes d’existence en termes politique, juridique et bio-écologique.
* Future Earth, le Groupe d’observation de la Terre (GEO) et douze partenaires dont l’ANR et AllEnvi.
** Wayan Tunas Artama, Universitas Gadjah Mada/ One Health Collaborating Center, Indonesia Nadia Belaidi, CNRS - National Museum of Natural History, France Vincent Douzal, National Research Institute for Agriculture, Food and Environment, France Luc Doyen, CNRS - Research Group Theoretical and Applied Economics, France Olivier Hamant, École Normale Supérieure de Lyon, Institute Michel Serres and INRAE, France Mohamed Mindhiri, Moheli National Park, Comoros Laurence Pascal, University Of Montpellier, France Benoit Prévost, University of Montpellier 3, France Christine Raimond, CNRS-UMR Research Pole for the Organisation and Dissemination of Geographic Information, France Florence Sylvestre, European Centre Research,Teaching In Geosciences De L'environnement and IRD, France Dangbet Zakinet, University of N'Djamena, Chad Jefferson Ferreira-Ferreira, Mamirauá Institute for Sustainable Development, Brazil David Nadler Prata, Federal University of Tocantins, Brazil Stephanie Nasuti, Center for Sustainable Development /University of Brasilia, Brazil Martha Vogel, UNESCO Man and the Biosphere Programme, France Gillian Bowser, Natural Resource Ecology Lab / Colorado State University, USA
Le Service Partenariat et Contrats de Recherche (SPCR) Occitanie assurera la contractualisation de ce projet avec l'ANR.
Contact science :
Olivier Barrière, IRD, UMR Espace-Dev OLIVIER.BARRIERE@IRD.FR
Contacts communication :
Fabienne Doumenge, Julie Sansoulet COMMUNICATION.OCCITANIE@IRD.FR
Source : https://www.ird.fr/une-nouvell...