Un rencard avec la science
Publié par Thibault Lemaire, le 4 décembre 2019 1.3k
La recherche scientifique est souvent définie comme quelque chose d’opaque, d’inaccessible, de complexe. Perçue comme un sujet enfermé dans des laboratoires, excepté lorsqu’une découverte est faite. Subissant malgré elle cette retenue qu’on lui attache, elle reste pourtant bien accessible et ne demande qu’à faire parler d’elle.
La rencontre
10h00 pile à mon téléphone lorsque je franchis pour la première fois la porte d’entrée du Muséum de Toulouse. Si je suis debout ce matin, c’est parce que je participe à un speed-dating. Dans le superbe décor du Moaï, une dizaine de personnes attablées discutent déjà avec quelques curieux qui, comme moi, ont rendez-vous avec la science.
1h30, c’est le temps dont je dispose pour écouter et questionner pendant une quinzaine de minutes les douze chercheurs venus parler de leurs travaux. Entre une tasse de café et un verre de jus de fruit, je questionne un sociologue à propos de ses travaux sur l’impact de l’IA au travail ; une historienne de l’art sur la création de réseaux sociaux entre artistes au XVIIIe siècle ; ainsi qu’un jeune doctorant sur l’évaluation d’une preuve historique avec notre regard contemporain.
Autour de moi, des visiteurs de tous âges posent leurs questions à ces chercheurs qui, le sourire aux lèvres, leur répondent de bon cœur. Les sujets sont les mêmes pour tous et pourtant, les interrogations qui nous viennent à l’esprit sont bien différentes. Nos discussions nous entraînent vers des thématiques parfois éloignées de nos premières interrogations et les quinze minutes de tête à tête, bien plus rapides qu’il n’y paraît, deviennent alors difficiles à tenir.
Premier rendez-vous
14h30, je me rends à l’auditorium pour assister à la conférence «Pechakucha», la tête encore remplie des échanges de la matinée. Cette fois les rôles sont inversés, c’est aux chercheurs d’être contraints par le temps.
Ils sont dix à ne disposer que d’un quart d’heure pour présenter leurs travaux de recherche. Une conférence express où chacun doit être aussi concis que clair. L’exercice est particulier mais donne un dynamisme attrayant.
Malgré les contraintes, tous prennent le temps de parler calmement, de nous expliquer pourquoi où et comment ils travaillent sur leur sujet. L’auditoire est attentif, adultes et enfants tendent l’oreille pour écouter à quel moment la réponse au quiz qui nous a été distribué va être donnée.
Tandis que ces hommes et femmes de sciences nous content leurs travaux, stylo à la main, j’écoute. Pourquoi le marketing est-il genré ? Comment un archéologue du paléolithique en vient-il à étudier la relation entre nos ancêtres et les cétacés ? Où est-ce qu’une historienne fait ses recherches sur les représentations des dieux polythéistes ?
La belle famille
16h30, la table ronde « Genre et Sciences » va commencer. C’est la dernière étape de la journée. Quatre nouveaux chercheurs, de disciplines bien différentes, sont réunis pour nous parler des nombreux changements que les études du genre ont occasionnées dans les autres domaines scientifiques. Après que chacun d’entre eux aient partagé leurs avis sur le sujet, nous sommes invités à participer, à poser nos questions.
Quelques téméraires s’y adonnent à cœur joie. La première question portait sur des objets préhistoriques, pourtant, c’est bien un sociologue qui vient de compléter la réponse de l’historienne.
C’est alors presque dans l’ambiance d’un repas de famille que cette attablée, friande des sciences, ne cherche non pas à avoir le dernier mot, comme dans nos repas de Noël à venir, mais à partager, discuter, construire le savoir, la recherche. Et c’est bien comme cela : un partage, une rencontre que la science doit être envisagée.