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Quand une guerre en cache une autre : les ressorts de la guerre en Ukraine

Publié par Mondes Sociaux, le 7 avril 2022   740

Article par Natacha Laurent

Comment l’histoire de la Seconde guerre mondiale est instrumentalisée dans le discours officiel russe pour justifier la guerre en Ukraine ? La nécessité d’une « dénazification » de ce pays est invoquée depuis l’invasion de la Crimée en 2014 et continue de servir aujourd’hui. Quelles références mémorielles et discursives servent l’imaginaire social en Russie ?

Léon Tolstoï, Opération spéciale et Paix. Ces mots, qui se détachent sur une couverture ocre, avec une frise dorée, et ornée d’un portrait du grand écrivain, ont fait le tour des réseaux sociaux en Russie une semaine après le début de l’invasion de l’Ukraine. Ce collage se mit à circuler largement alors même que les autorités russes venaient à peine de décréter l’interdiction d’utiliser le mot guerre pour qualifier ce qui est désormais systématiquement présenté comme une « opération spéciale ».

Signe d’une distance certaine prise par une partie de la population à l’égard du discours officiel, cette réaction s’inscrit dans la tradition des célèbres anecdotes de la période soviétique. Elle révèle en effet les paradoxes, voire aux yeux de certains les incohérences, du principal argument invoqué par Vladimir Poutine pour justifier l’intervention militaire : « dénazifier » l’Ukraine. D’un côté, il ne s’agit pas d’une guerre, nous explique-t-il, mais de l’autre il invoque la nécessité de « libérer » ce territoire slave, toujours présenté comme une création artificielle, d’un mal qui, lui, renvoie directement à une autre guerre, et pas n’importe laquelle : la Seconde Guerre mondiale.

« Dénazifier l’Ukraine »

L’emploi obsessionnel du mot « dénazification » par la propagande russe a pu surprendre en Europe occidentale : comment expliquer ce recours systématique et massif à une catégorie, certes toujours signifiante dans nos sociétés, mais qui n’en apparaît pas moins comme obsolète ? Pourquoi ce passé est-il encore si brûlant et son instrumentalisation si opératoire dans la Russie d’aujourd’hui ? Quels sont les fondements de ce pilonnage médiatique opéré par Moscou ?

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