Les artistes américains face à Donald Trump
Publié par Mondes Sociaux, le 21 avril 2022 710
Article par Violaine Roussel
Les rapports entre les artistes et la politique occupent régulièrement le devant de la scène médiatique, tout particulièrement à l’occasion des campagnes électorales. Les États-Unis ont une longue histoire de mobilisations d’artistes et d’usages politiques des œuvres dans différents mondes de l’art. C’est en regard de ces formes d’engagement passées que se pose la question de leur transformation : l’accession de Donald Trump à la présidence américaine a-t-elle marqué un renouveau du rôle politique des artistes et des modes de résistance qu’ils déploient ? Si tel est bien le cas, en quoi ces mutations des rapports entre artistes et politique consistent-elles exactement et quelle est leur portée ?
Un tournant historique ?
Avec l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis, en 2017, des artistes aux profils variés partagent le sentiment de vivre un moment historique. Ils dénoncent alors des menaces inédites pesant sur la liberté de création et d’expression. Bien plus, l’arrivée de Donald Trump au pouvoir est perçue comme un tournant, éclipsant l’interprétation classique de l’alternance partisane en termes de mouvement de balancier, conduisant classiquement un président républicain à succéder à un démocrate ayant déjà rempli deux mandats.
Cette vision s’impose d’autant plus puissamment que le nouveau président et ses soutiens affirment également incarner une rupture avec les pratiques et les personnels politiques du passé. Le récit collectif de l’Histoire en train de se faire se construit à travers cette croyance, largement partagée de part et d’autre, dans le caractère fondateur du « moment Trump », séparant un « avant » d’un « après ».
Donald Trump n’est bien évidemment pas le premier professionnel d’Hollywood à faire carrière en politique – y compris chez les Républicains – mais au contraire de ses prédécesseurs, de Reagan à Schwarzenegger, il ne s’est pas converti au métier politique en adoptant les codes et les logiques du jeu politique et partisan. À l’inverse, il a défini son image et son identité politiques contre les conventions de la politique professionnelle traditionnelle : il se présente comme celui qui n’est pas du sérail et qui peut « mieux représenter » les citoyens-électeurs lambda précisément du fait de sa distance par rapport à cette élite politique qui fait reposer sa légitimité sur la détention de compétences spécialisées.
En effet, Donald Trump n’est pas issu du monde des professionnels de la politique.