L’anatomie clastique : redécouverte d’un art et d’un patrimoine
Publié par Lucile Pinasa-Causse, le 13 février 2017 3.4k
L’Université Toulouse III – Paul Sabatier regroupe de vastes collections pédagogiques, anciennes, aujourd’hui patrimonialisées. Parmi elles, la collection de biologie animale constituée à partir de 1838, année de création de la chaire de zoologie à la Faculté des sciences de Toulouse, pour servir l’enseignement de cette discipline. Récoltes personnelles, achats ou dons, les collections s’enrichissent au fil des ans de spécimens de plus ou moins grande valeur, jusqu’à ce que l’évolution de la pédagogie et de ses outils voue ces pièces à l’oubli. Un travail d’inventaire et de documentation mené par l’université a récemment permis de redécouvrir en zoologie quelques pièces rares, notamment trois modèles d’anatomie clastique réalisés par le Dr. Louis Auzoux au XIXe siècle (l’université conserve également d’autres modèles plus récents d’anatomie humaine).
Nombreux autres établissements d’enseignement d’Occitanie conservent quelques exemplaires de ce patrimoine pédagogique comme par exemple l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, le collège Gambetta de Cahors ou encore l’Université de Montpellier.
La technique mise en œuvre par Louis Auzoux pour réaliser ses modèles anatomiques est totalement novatrice. Celle-ci prend en 1834 le qualificatif de « clastique », mot créé à partir du verbe grec klao (κλάω) signifiant briser, rompre. Effectivement, le premier point d’intérêt de ces pièces d’anatomie artificielles est qu’elles sont entièrement démontables. Médecin de formation, Louis Auzoux cherche initialement à créer des modèles anatomiques réutilisables afin de limiter le recours aux dissections dans les classes d’enseignement de médecine.
La véritable révolution de ces modèles tient non seulement de leur matière, un alliage de pâte à papier et de poudre de liège notamment, mais surtout du fait que l’usage de matrices de fabrication rend ces modèles reproductibles à l’identique, ouvrant ainsi la voie à une production en série.
À l’origine conçue pour créer des modèles d’anatomie humaine, cette technique va permettre à Louis Auzoux de créer d’autres maquettes pour la zoologie et même la botanique.
Concernant la maquette de dindon datée de 1858 et conservée à l’UT3-PS, la grande rigueur scientifique de ses pièces en fait un outil pédagogique que l’on pourrait encore utiliser aujourd’hui. Ainsi, un professeur en biologie animale de l’université, Jacques Chanteloup, s’est prêté à l’exercice afin de démontrer l’actualité et la pérennité des modèles d’Auzoux.