Ebola : dilemmes éthiques sur des résultats sérologiques dissonants
Publié par IRD Occitanie, le 10 janvier 2024 480
Une chercheuse associée à l’unité TransVIHMI a entrepris une étude sur la communication des résultats des tests sanguins d'Ebola aux patients ayant fait l'objet d'un diagnostic erroné. Elle a montré que face à cette question éthique, les avis des professionnels de la santé divergent : certains prônant le devoir d’informer le patient, d’autres préférant ne pas le traumatiser. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Santé Publique.
Cette analyse a été rendue possible grâce aux scientifiques de l'UMI TransVIHMI et du CERFIG en Guinée qui ont réalisé en 2018 les analyses sérologiques en amont.
« Notre enquête démontre l’importance de questionner la pertinence de l’annonce de résultats biologiques et médicaux lorsque ceux-ci peuvent avoir des conséquences sur la santé mentale du patient, notamment lorsqu’ils viennent contredire un diagnostic médical antérieur », livre Eva Barranca, auteur de l'étude, docteure en anthropologie et santé publique.
Selon l'OMS, 28 000 cas d'Ebola sont officiellement déclarés / an.
En Guinée, après l’épidémie d’Ebola qui a eu lieu entre 2014 et 2016, des tests sanguins révèlent que certaines personnes qui pensaient avoir été infectés par le virus ne l'ont en réalité jamais contracté, tandis que d'autres avaient été infectées sans le savoir. Les raisons de ces retours sur diagnostics ne peuvent pas être déterminées avec précision, mais ces situations ont posé une question importante : faut-il ou non annoncer ces résultats aux personnes concernées plusieurs années après la fin de l'épidémie ?
Entre 2019 et 2020 à Conakry, une enquête a été menée au cours de laquelle 24 personnes composées de professionnels de la santé et de survivants d'Ebola ont été interrogées. La plupart déclarent qu’il faut informer ceux qui pensent n’avoir été jamais malades qu'ils ont en réalité été infectés par le virus. D'autres estiment que l'information doit être adaptée à la capacité des patients à la gérer. Les survivants d'Ebola sont eux-mêmes réticents à découvrir qu'ils n'ont en réalité jamais été malades, car l’expérience de la maladie et de la vie après celle-ci a été particulièrement traumatisante.
Au final, la question centrale réside dans la recherche d'un équilibre entre le respect du droit des patients à savoir la vérité, et le devoir des médecins à bien communiquer. C'est un défi éthique qui demande une réflexion approfondie. Un rappel que la notion de vérité en médecine peut être complexe.
Publication : Barranca E. 2023 Quand la sérologie contredit le vécu de la maladie : Éthique, recherche et annonce à propos d’Ebola en Guinée [When serology contradicts the experience of the disease: Ethics, research, and announcements about Ebola in Guinea]. Sante Publique. 35(1):65-73. https://doi.org/10.3917/spub.231.0065
Ce projet de sensibilisation a bénéficié de la collaboration de deux étudiantes du master GE : Gestion de l'environnement (Evalie Goudard et Clémence Dugué, université de Montpellier), engagées dans la communication du SALON AD NATURA (12 et 13 décembre 2023). Le salon met l'accent sur le thème From One Health to Eco Health.
Source : https://www.ird.fr/ebola-dilem...