Diversification des plantes à fleurs : une très longue histoire !
Publié par IRD Occitanie, le 19 juin 2024 540
Il aura fallu 300 scientifiques rassemblés pour décrypter l'arbre de vie des Angiospermes, ces plantes à fleurs qui dominent nos écosystèmes terrestres. Menés par le jardin botanique de Kew (UK), ces travaux impliquant l'IRD et basés sur l’analyse de génomes de noyaux cellulaires sont publiés dans Nature.
Riz, baobab ou liseron, ce sont toutes trois des Angiospermes, autrement dit des plantes à fleurs, comme 90% des végétaux qui peuplent notre planète. Une récente révision nous éclaire sur leur histoire et leurs liens de parenté.
Les Angiospermes sont présentes dès le Mésozoïque
Le Mésozoïque est plus connu par les noms des périodes qui le composent - Trias, Jurassique, Crétacé (du plus ancien vers le plus récent) – et le plus souvent associé aux fameux dinosaures. Mais cette ère est aussi le théâtre d’une innovation biologique majeure : la naissance des plantes à fleurs. Actuellement, les Angiospermes constituent le groupe de plantes terrestres le plus diversifié, avec plus de 300 000 espèces connues. Ce sont elles qui forment l’essentiel de nos paysages, nous nourrissent, nous soignent, fournissent des aliments pour les animaux sauvages et domestiques, des matériaux pour nos maisons, etc… la liste serait longue. En substance, sans elles les humains ne survivraient pas ! Mais comment ont-elles évolué depuis leur apparition ? « Associant plus de 300 collaborateurs dont l'IRD et de nombreux instituts du Sud, notre publication montre l'histoire de diversification des Angiospermes grâce à un jeu de données massif au niveau moléculaire », raconte Thomas Couvreur, botaniste à l’UMR DIADE, qui a participé à l’aventure avec ses collègues Jérôme Munzinger (AMAP) et Yohan Pillon (DIADE).
L’essor des plantes à fleurs
Pour comprendre la diversité actuelle et l’écologie de ce groupe végétal omniprésent, il faut connaître ce que les spécialistes appellent l’arbre phylogénétique. L’équivalent de notre arbre généalogique mais sur des millions d’années. Ce schéma de ramification reflète la façon dont les espèces, genre ou familles ont évolué à partir d'ancêtres communs. Pour remonter dans le temps, les scientifiques utilisent des méthodes de séquençage de l’ADN. Jusqu’à présent la classification des Angiospermes avait été construite principalement sur la base d’analyses du génome – peu variable – des chloroplastes. Toutefois, l'échantillon peu représentatif limitait la fiabilité de ces résultats. La publication réalisée sous la direction du Jardin botanique de Kew révèle l’arbre phylogénétique de près de 8 000 genres d'angiospermes, basé sur 353 gènes nucléaires. Cette multiplication par 15 de l'échantillonnage au niveau du genre par rapport aux études comparables permet de tester de manière critique les résultats antérieurs et d'apporter des changements significatifs dans des groupes clés, en particulier au sein des Rosidae. Avec plus de 100 familles et plus de 50 000 espèces, ce groupe représente plus du quart des plantes à fleurs. Les trois botanistes de l’IRD ont contribué à l’échantillonnage, la détermination des espèces, la délimitation des genres, pour les familles Annonacées, Cunoniacées et Sapindacées. L’arbre phylogénétique a été calibré en fonction du temps, notamment à l’aide de 200 fossiles. Celui-ci permet d'obtenir des informations inédites sur la dynamique de diversification à grande échelle des angiospermes, confirmant l'explosion précoce (entre la fin du Jurassique et le début du Crétacé) de la diversification qui a donné naissance à plus de 80 % des plantes à fleurs actuelles. Une diversification régulière s'est ensuivie pendant le reste de l'ère mésozoïque jusqu'à une nouvelle accélération au cénozoïque (débutant il y a 66 millions d'années), parallèlement à la baisse des températures mondiales et à la diversification des insectes.
Une classification améliorée
Ce travail d’envergure conduit à une amélioration de la classification des Angiospermes avec des frontières qui vont bouger entre les ordres, familles et genres, pour aboutir à une plus grande stabilité. L'ensemble des découvertes réalisées grâce à ces méthodes phylogénétiques prépare également le terrain pour de futurs travaux visant à établir un arbre au niveau de l'espèce et non plus au niveau du genre. Cette approche s'applique facilement aux collections d'herbiers, ce qui augure d'importants volumes de nouvelles données bientôt disponibles pour un large éventail d'applications dans le domaine de la diversité végétale, de la systématique et de la macroévolution.
Publication : Zuntini, A.R., Carruthers, T., Maurin, O. et al.Phylogenomics and the rise of the angiosperms. 2024. Nature. https://doi.org/10.1038/s41586-024-07324-0
Contacts science : Thomas Couvreur, IRD, DIADE, THOMAS.COUVREUR@IRD.FR ;
Jérôme Munzinger, IRD, AMAP JEROME.MUNZINGER@IRD.FR
Yohan Pillon, IRD, DIADE YOHAN.PILLON@IRD.FR
Contacts communication : Fabienne Doumenge, Julie Sansoulet COMMUNICATION.OCCITANIE@IRD.FR
Source : https://www.ird.fr/diversifica...