Couleurs de la nature : les plantes tinctoriales

Publié par Lucile Pinasa-Causse, le 13 janvier 2017   5.6k

La teinture, technique pratiquée depuis la fin du Néolithique, a vu sa palette de couleurs s’enrichir au fil du temps et des échanges culturels et commerciaux.

Jusqu’au XIXe siècle, où l’on voit émerger l’usage de colorants chimiques, diverses sources naturelles de pigments pouvaient être utilisées. Si certains insectes, mollusques ou même lichens pouvaient être employés pour leurs propriétés colorantes, le recours aux plantes reste le plus courant.

Sur la trentaine d’espèces de plantes tinctoriales que présente le Jardin Botanique Henri Gaussen dans la section dédiée de sa « spirale » ethnobotanique, arrêtons-nous aujourd’hui sur trois couleurs : le bleu, le rouge et le jaune.

  • Le bleu d’ici et d’ailleurs : pastel et indigotier

En « pays de Cocagne », lorsqu’on parle de teinture bleue on pense immédiatement au pastel – ou guède –, pIsatis tinctorialante dont les feuilles (partie utilisée pour la teinture) ont permis à de nombreux négociants de faire fortune dans les régions de Toulouse et Albi.
Plante employée depuis longtemps, on la retrouve jusqu’en Égypte et en Mésopotamie et l’on constate son usage dès l’Âge du fer en Europe. Son monopole perdure jusqu’à l’introduction des indigotiers.

Principalement originaires d’Asie et d’Amérique, les indigotiers servent de colorant principalement en Inde et au Moyen-Orient. C’est aux XVIIe-XVIIIe siècles, lors de l’essor des échanges commerciaux avec ces régions, Indigofera tinctoria que la plante arrive en Europe et que la production de pastel se voit très sérieusement concurrencée puis remplacée par celle de l’indigo. Si son pouvoir colorant le rend bien plus économique que le pastel, la culture de l’indigo périclite après la découverte d’un procédé chimique de synthèse en 1897.

  • « On m’appelle Garance, c’est l’nom d’une fleur »

Rubia tinctoria

Si pour certains le nom de Garance renvoie à l’actrice Arletty, c’est avant tout une plante dont la racine sert à produire une teinture rouge aux nombreuses nuances possibles.

Son volume de production permet un usage à plus grande échelle que ses principaux colorants concurrents tirés d’insectes : les cochenilles. Au Moyen-Âge, Charlemagne en recommande même la culture.

Cependant, son usage est bien antérieur puisqu’on la retrouve dès l’Antiquité en Égypte, en Grèce et bien sûr en Italie pour n’aborder que le bassin méditerranéen. La garance reste longtemps la principale source de rouge puisqu’au début de la Première Guerre mondiale elle sert encore à teindre les pantalons et les képis des militaires français. L’alizarine, matière colorante rouge extraite de la racine de garance, est synthétisée en 1869 et la supplante rapidement.

  • Réséda, genêt, sarrette etc.

De nombreuses plantes permettent d’obtenir une teinture jaune. Parmi elles, certaines sont utilisées depuis le Néolithique ou l’Antiquité. Toutes ne sont cependant pas équivalentes.

Le genêt, bien qu’apprécié pour son joli jaune brillant notamment sur la laine, est également connu pour être un peu moins riche en colorant que le réséda ou la sarrette mais être en contrepartie plus économique.

La sarrette peut être utilisée comme substitut au réséda mais on peine à retrouver des traces anciennes de son usage.

Le réséda quant à lui, semble être particulièrement apprécié pour la solidité de ses jaunes qu’on peut également associer à d’autres plantes tinctoriales pour obtenir de beaux verts ou orange. Plante importante dès le Moyen-Âge pour la teinture de la soie et de la laine, son usage décline au XIX e siècle comme celui de la majorité des plantes tinctoriales.

Genista tinctoria