Chirurgie, douce chirurgie

Publié par Université de Montpellier UM, le 17 octobre 2017   2.9k

Explorateurs du corps humain, les chirurgiens voient leurs pratiques évoluer grâce la chirurgie « mini-invasive » : des techniques qui réduisent la pénibilité des opérations et facilitent la vie des patients.

C’est une véritable révolution douce. Une technique opératoire qui propose des interventions tout aussi efficaces, mais moins lourdes pour le patient. Le principe ? Au lieu de pratiquer de grandes ouvertures au bistouri pour mettre au grand jour les organes à soigner, les médecins réalisent de minuscules incisions par lesquelles ils insèrent leurs instruments. Principal avantage de cette technique : elle réduit le traumatisme opératoire et permet au patient de récupérer plus rapidement.

A Montpellier, le professeur Charles Marty-Ané est un pionnier dans l’utilisation de la chirurgie mini-invasive pour traiter les patients atteints de cancer du poumon qui doivent subir une lobectomie, opération qui consiste à enlever le lobe pulmonaire où se situe la tumeur. Pour réaliser cette opération en chirurgie classique dite « ouverte », les médecins pratiquent une thoracotomie : le thorax du patient est largement ouvert pour que le médecin puisse accéder au poumon. « Ce type d’intervention provoque des douleurs thoraciques violentes car elle impose de sectionner les muscles », explique Charles Marty-Ané. Des douleurs qui peuvent avoir des conséquences graves en suite opératoire. « Le patient a tellement mal qu’il lui est difficile de respirer, et surtout il ne peut plus tousser ce qui empêche d’éliminer les sécrétions pulmonaires et augmente le risque de complication et de surinfection ».

Trois petits trous

L’alternative en chirurgie mini-invasive ? La thoracoscopie vidéo assistée. « Trois orifices d’un centimètre seulement sur la face latérale du thorax, par lesquels sont introduits les instruments et une caméra qui permet d’avoir une vision panoramique de la cage thoracique et de guider les gestes du chirurgien », explique Charles Marty-Ané. Le lobe pulmonaire une fois sectionné est alors retiré par l’un des orifices qui est légèrement agrandi pour l’occasion. Quels avantages pour le patient ? « Une réduction considérable des douleurs post-opératoires et des complications liées à la douleur », répond le chirurgien. Les patients voient ainsi leur durée de convalescence raccourcie et sortent de l’hôpital 2 à 4 jours après l’opération contre 8 à 10 jours pour la thoracotomie. « Ils reprennent plus rapidement une vie normale », souligne le spécialiste.

En plein essor, la lobectomie par thoracoscopie est en passe de devenir la technique de référence. Si elle s’est développée lentement depuis sa mise au point en 1995, elle représente aujourd’hui 30 % des lobectomies en France. Encore loin derrière certains pays comme la Chine, la Corée, le Japon ou les Etats-Unis où 40 % des lobectomies pulmonaires sont réalisées selon cette procédure. Des pays qui restent pourtant très loin derrière le service de chirurgie thoracique du CHU de Montpellier, véritable pionnier en la matière : « sur les cinq dernières années, 74 % des lobectomies ont été réalisées par thoracoscopie », explique Charles Marty-Ané. Cette année son service a dépassé la barre des 1000 interventions de ce type, lui conférant une expertise unique en France et même en Europe.

Choisir la meilleure solution

Si la chirurgie mini-invasive représente une vraie révolution dans la prise en charge des cancers du poumon, son avantage est moins flagrant dans d’autres disciplines, notamment en cardiologie. Les opérations « ouvertes » par sternotomie, opération qui consiste à ouvrir le sternum pour accéder au cœur, sont généralement bien tolérées par les patients et restent la référence dans la majorité des cas. « Pour faire de la chirurgie mini-invasive, il faut bénéficier d’une équipe bien entraînée et d’un matériel adapté mais surtout il faut sélectionner scrupuleusement les malades », explique le professeur Roland Demaria, chirurgien cardiaque au CHU de Montpellier. Pour l’heure la chirurgie mini-invasive concerne essentiellement les patients en bonne condition physique dont les valves cardiaques doivent être réparées ou remplacées. « Au final très peu de patients sont éligibles à ces techniques », souligne Roland Demaria.

Pour le chirurgien, l’avenir de la discipline réside plutôt dans la cardiologie interventionnelle moderne, une discipline hybride née de la collaboration étroite entre les chirurgiens et les cardiologues. « Ce rapprochement permet de choisir la meilleure solution pour chaque patient en discutant chaque cas avec l’ensemble du staff médical », précise Roland Demaria. La cardiologie interventionnelle permet par exemple de remplacer une valve aortique défaillante sans avoir à ouvrir le thorax du patient. « Il suffit de pratiquer une incision au niveau de l’aine et d’y introduire une nouvelle valve qu’on fait remonter jusqu’au cœur en suivant la voie artérielle. La procédure est beaucoup moins lourde pour le patient qu’une opération classique », souligne le chirurgien.

Le recours à ces techniques permet bien souvent aux patients de rentrer chez eux plus tôt. Et des patients qui quittent l’hôpital plus vite pour reprendre le chemin du travail, ce sont aussi des patients qui coûtent moins cher. « A 1500 euros la journée d’hospitalisation, les économies pour le système de santé sont loin d’être négligeables », précise Charles Marty-Ané.  

(C) CHU Montpellier