L'AURCA recrute une(e) doctorant(e) en aménagement et urbanisme

Sujet : « adapter les littoraux au changement climatique : penser, co-construire et opérationnaliser la recomposition spatiale (le cas de la côte sableuse des Pyrénées-Orientales) »

Afin d’assurer la mise en œuvre de son programme de travail partenarial et dans le cadre de sa politique de développement et des missions qui lui sont confiées, l’agence d’urbanisme catalane recrute un(e) doctorant(e) en aménagement et urbanisme dans les conditions suivantes 

Contexte de la thèse :

Les territoires littoraux sont soumis à des risques importants. Le recul du trait de côte tout d’abord, qui concerne environ un quart du littoral de France métropolitaine (22 %). Le risque de submersion marine ensuite, lié à la montée des eaux, qui concerne aujourd’hui environ 1,5 millions d’habitants en France. On y constate une déconnexion entre les menaces qui s’y exercent – qui vont croissant avec le changement climatique – et leur attractivité résidentielle – qui ne se dément pas. E. Cazaux a ainsi montré dans sa thèse que les prix des transactions foncières et immobilières à vocation résidentielle n’étaient que très peu affectées par ces risques côtiers (Cazaux, 2022).

Une telle situation de vulnérabilité est la résultante directe des modes d’occupation de l’espace littoral privilégiés depuis plusieurs siècles. Au cours des XIXe et XXe siècles, le littoral est ainsi passé d’un « territoire du vide » (Corbin, 1988) à un « territoire du trop plein » (Deboudt, 2010). De fait les littoraux ont été, au cours des siècles derniers et tout particulièrement depuis le milieu du XXe siècle, poldérisés, équipés, aménagés, urbanisés, industrialisés, touristifiés, défendus contre la mer, etc. L’aménagement du littoral s’est inscrit dans une logique prométhéenne de conquête et de maîtrise du milieu par les sociétés humaines. L’artificialisation des sols est aujourd’hui particulièrement marquée sur la bande littorale et rétro-littorale.

La vulnérabilité des territoires littoraux se trouve en outre accrue par le changement climatique. Selon le GIEC, le niveau de la mer pourrait augmenter d’ici 2100 de 43 cm à un mètre en moyenne, entraînant d’importantes conséquences potentielles : de 5 000 à 50 000 logements pourraient être atteints par le recul du trait de côte à l’horizon 2100 pour une valeur immobilière estimée entre 0,8 et 8 milliards d’euros (Cerema, 2019). L’habitabilité future des territoires littoraux est en cause, appelant à y faire évoluer les modes d’habiter (Robert et Melin, 2016).  

En première ligne face à la crise climatique, les territoires littoraux se trouvent confrontés à une « injonction de l’adaptation » (Berdoulay et Soubeyran, 2020, p. 15) qui doit conduire à en repenser l’aménagement à nouveaux frais. Intégrer l’adaptation dans les politiques publiques d’aménagement doit en effet permettre d’anticiper les effets – plus ou moins prévisibles mais inévitables – du changement climatique sur les territoires afin de rendre ces derniers moins vulnérables, plus résilients (Da Cunha et Thomas, 2017). Or, la problématique de l’adaptation « réinterroge la relation de l’Homme à son milieu » (Richard, 2016, p. 29) et met à mal le paradigme de la maîtrise humaine de la nature qui a longtemps caractérisé les politiques de gestion des espaces littoraux dans le cadre de la défense contre la mer et de la protection côtière (Miossec, 1998 ; Bawedin, 2013). « L’évolution des relations que nous entretenons avec notre environnement nous enseigne que désormais, gérer l’érosion consiste davantage à chercher des comportements d’adaptation qu’à résister à un phénomène que l’on sait inexorable » (Clus-Auby, 2003). Penser en termes d’adaptation conduirait les acteurs des territoires à inventer de nouvelles relations à la nature et à ses dynamiques (Rode, 2023). C’est d’ailleurs une telle logique qui, en France, sous-tend depuis quelques années les politiques publiques à destination des territoires littoraux (Stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte lancée en 2012 ; à l’échelle de la Région Occitanie Plan Littoral 21 en 2017, Stratégie Régionale de Gestion Intégrée du Trait de Côte en 2018, SRADDET Occitanie 2040, etc.). 

Les territoires littoraux d’Occitanie sont confrontés à une phase de transition. D’un point de vue de l’aménagement, le fonctionnement et la structuration des stations balnéaires, héritages de la Mission Racine pour certaines, peuvent être remis en question. On note des changements d’usages liés à un contexte sociétal mouvant : développement du temps libre et des loisirs (Viard, 2015), changement dans la pratique des espaces urbains ou naturels, apparition de nouvelles façons de travailler ou de se déplacer, d’imaginer sa carrière professionnelle ou sa retraite, etc. Ces territoires restent pourtant très attractifs et peuvent être le premier point de chute des « néo-Occitans ». En réponse à ces dynamiques parfois subies, les gestionnaires imaginent transformer les stations estivales en des « stations 4 saisons » ou des « villes littorales » (Brulay, 2007 ; Medjdoub, 2022). Toutefois, la contrainte des risques littoraux et des effets du changement climatique impacte ces espaces littoraux : submersion marine, érosion côtière, élévation du niveau marin, raréfaction des ressources en eau potable, multiplication des pics de chaleur et incendies. Par ailleurs, les mesures d’atténuation de ces effets à large échelle peinent à être mises en œuvre à l’échelle internationale comme à l’échelle locale.

Ainsi le levier de l’adaptation doit être actionné. C’est pourquoi, dans le cadre d’échanges avec techniciens et élus du littoral en Occitanie, la question de la recomposition spatiale est récurrente. C’est une notion introduite récemment par le constat de la nécessaire adaptation aux effets des risques littoraux et du changement climatique. Elle mérite d’être définie, pensée et mise en application tant elle est transversale et multiforme. La Stratégie Nationale de Gestion Intégrée du Trait de Côte (SNGITC) et le Plan d’Actions pour l’Adaptation du Littoral d’Occitanie au changement climatique (PARPAL du Plan Littoral 21) posent des bases de réflexions et incitent les territoires à agir, mais la complexité du contexte sociétal, environnemental et réglementaire paralyse l’action (Mineo-Kleiner, 2017 ; Mineo-Kleiner et al., 2021). En effet, les injonctions réglementaires à agir se superposent et complexifient la tâche. Les territoires littoraux sont en première ligne face à la crise climatique mais également soumis à la gestion d’autres risques naturels (notamment inondations en plaine littorale), à la nécessaire protection des paysages ou des espaces naturels et agricoles notamment par les dernières dispositions en matière de réduction de l’artificialisation des sols. Pourtant, pour rester attractifs à l’horizon 2050 et au-delà, les collectivités littorales doivent progresser, elles doivent mieux connaître leur territoire pour mieux agir et réaliser des choix « sans regret ». Par ailleurs, les élus ont également conscience que les conséquences de l’inaction sont toujours plus lourdes que celles de la prévention. 

Il est donc temps d’activer de nouveaux leviers et d’impulser des réflexions transversales, multi-acteurs, pluri-disciplinaires à différentes échelles spatiales et temporelles pour surmonter les blocages. Il convient pour cela de conduire une réflexion globale sur le réaménagement de l’espace littoral. En effet, la recomposition spatiale ne saurait se réduire à la seule relocalisation ponctuelle d’enjeux, mais doit s’inscrire dans un nouveau projet de territoire (Chotard et al., 2021). Le chantier est vaste et ambitieux mais nécessaire pour garantir l’attractivité des territoires littoraux à long terme. 

Missions :

En étroite collaboration avec le pôle transition écologique et énergétique de l’AURCA et avec le laboratoire ART-Dev de l’Université de Perpignan Via Domitia (UPVD), vous aurez ainsi pour missions principales :

  • Faire un état de l’art scientifique exhaustif sur les questions de l’adaptation et de la recomposition spatiale des littoraux, préalable indispensable pour comprendre les enjeux sous-jacents sur la bande côtière et en rétro-littoral.
  • Enquêter auprès des divers acteurs parties-prenantes (élus, usagers permanents ou saisonniers, socio-professionnels) afin de cerner leurs représentations du littoral et de ses évolutions, leurs contraintes, leurs attentes, etc. Cela permettra d’analyser et de reconstituer la complexité des jeux d’acteurs impliqués dans les réflexions sur l’adaptation et la recomposition spatiale des littoraux, tout en questionnant de potentiels points de blocage et points d’accord.
  • Participer aux réflexions menées à l’échelle régionale (Plan Littoral 21) en matière d’action d’adaptation au changement climatique et observer le déroulé des démarches sur les 6 unités sédimentaires d'Occitanie – à ajuster en fonction des besoins identifiés par le Plan Littoral 21. 
  • Participer aux ateliers de concertation et commissions thématiques organisés dans le cadre des SCoT Plaine du Roussillon et Littoral Sud. Au besoin participer à l’identification des secteurs de la bande rétrolittorale à consacrer à des opérations de recomposition spatiale compte tenu du recul du trait de côte. – à ajuster en fonction des besoins identifiés par le Plan Littoral 21.
  • Travailler sur deux sites d’étude à enjeux qui ont commencé à réfléchir à l’engagement d’opérations de recomposition spatiale. Idéalement, ce site serait en articulation avec l’un de ceux retenus dans le cadre de l’étude menée par le Cerema sur le même périmètre. Il s’agira d’y analyser les tenants et les aboutissants de l’adaptation de ces espaces. Le doctorant sera en charge d’impulser et d’orchestrer un processus de co-construction en faisant travailler ensemble les acteurs de ces territoires autour d’orientations d’actions en matière d’adaptation et de recomposition spatiale. Cette réflexion pourra permettre de lever des blocages et activer des leviers d’action concrets. Chaque scénario fera l’objet d’une analyse multi-critères pour lesquels les coûts (pas seulement financiers) directs et indirects seront comparés.  
  • Formaliser en un ensemble de scénarios contrastés les réflexions collectives produites au cours des ateliers de travail entre parties-prenantes.

Profil recherché :

  • Diplômé(e) d’un master dans le domaine de l’urbanisme, l’environnement, l’aménagement du territoire, les sciences politiques (ou futur(e) diplômé(e) à l’issue de l’année universitaire 2023-2024.
  • Connaissance du fonctionnement, de la gestion et de la réglementation liés au littoral 

Compétences et qualités requises :

  • Ouverture d’esprit, aisance relationnelle, capacité d’écoute et de dialogue ; 
  • Autonomie et capacité à travailler en équipe, sens de l’organisation, rigueur et disponibilité dans le cadre d’un fonctionnement en mode projet ; 
  • Capacité d’animation de réunions avec les élus, le public et les techniciens ; 
  • Esprit de synthèse et bonnes capacités rédactionnelles ; 
  • Bonne expression orale, sens de la pédagogie ; 
  • Capacité d’initiative, curiosité, sens de la discrétion et capacité à rendre compte ;
  • Bonne connaissance des problématiques littorales et bonne appréhension des enjeux intercommunaux ; 
  • Aisance dans l’utilisation des outils cartographiques et graphiques et maîtrise des méthodes, outils et exploitations statistiques ;
  • Expérience dans les démarches scientifiques (recherches bibliographiques et réalisation d’un état de l’art notamment) et les techniques d’enquêtes (questionnaires, entretiens, ateliers de groupes).

Conditions de recrutement et d'encadrement :

  • La thèse se déroule dans le cadre d’une convention CIFRE entre l’AURCA et l’Université de Perpignan Via Domitia (UPVD). Elle sera rattachée au laboratoire ART-Dev (UMR 5281).
  • Encadrement entreprise (AURCA) : Provence Lanzellotti, chargée de mission “littoral”
  • Encadrement scientifique (UPVD) : Sylvain Rode, maître de conférences HDR en aménagement et urbanisme
  • Poste basé à Perpignan (80 % Aurca et 20 % UPVD), déplacements fréquents dans le département des Pyrénées-Orientales. Permis de conduire indispensable. 
  • Contrat à durée déterminée de trois ans 
  • Prise de poste souhaitée (sous réserve de validation du co-financement par l’ANRT) : septembre ou octobre 2024. 
  • Rémunération annuelle brute (sur 12 mois+primes) selon barème du dispositif CIFRE 
  • Tickets Restaurant et Participation Mutuelle. 

Modalités de candidature :

Les dossiers de candidature (lettre de motivation manuscrite + Curriculum Vitae + relevés de notes M1 et M2) sont à envoyer avant le 15 mars 2024 simultanément aux adresses suivantes :  aurca@aurca.org, melanie.bonneau@aurca.org, provence.lanzellotti@aurca.org et sylvain.rode@univ-perp.fr

Pour des compléments d’information concernant le projet de thèse et ses conditions de réalisation, écrire à :

Provence LANZELLOTTI  – provence.lanzellotti@aurca.org

Sylvain RODE - sylvain.rode@univ-perp.fr

Contact
AURCA 19, Espace Méditerranée - 6ème étage 66000 PERPIGNAN 04 68 87 75 52
Mail
provence.lanzellotti@aurca.org
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