Le Forum Régional Sciences et Société réunit chaque année une centaine d’acteurs et actrices impliqués dans le dialogue sciences-société en Occitanie afin de se rencontrer, de partager des expériences et imaginer des projets communs. L’édition 2024 portait sur le thème “Inclusion et lutte contre les inégalités” qui s’est décliné à travers 14 ateliers thématiques. 

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Retour sur l’atelier “Construire son cheminement professionnel : de la recherche participative menée avec des jeunes NEET à la conception d’un jeu”.

À Toulouse, dans le quartier du Mirail, des chercheuses ont mené une recherche-action avec des jeunes NEET (classification sociale signifiant “ni en emploi, ni en études, ni en formation”), en grande difficulté d’insertion, pour étudier les trajectoires professionnelles d’habitant-es du quartier, comprendre le rapport aux dispositifs d’orientation et d’insertion, et dégager des idées de solutions. La responsable du projet, Nathalie Chauvac, est venue partager cette expérience à l’occasion du Forum.

Nathalie Chauvac est maîtresse de conférence associée, et sociologue dans une coopérative de recherche en sciences humaines et sociales, SCOOL, qui a pour objet de développer des recherches avec la société.

En collaborant avec des jeunes du quartier du Mirail, elle souhaitait “voir le monde avec les yeux de ces jeunes, pas en emploi ni formation, afin de comprendre comment ils se représentent le marché du travail” et les différents dispositifs d’accompagnement. Pour cela, elle a mobilisé un groupe en les plaçant dans une posture d’enquêteurs et d’enquêtrices.   

L’idée était de ne pas passer par des dispositifs d’accompagnement vers l’emploi et la formation pour la première étape. En effet, ne recruter que des jeunes déjà accompagnés aurait faussé les résultats de l’étude. L’équipe qui associait aussi des designers des Imaginations Fertiles et des makers de Makers & co est allée sur différents lieux du Mirail (Reynerie, Bellefontaine), avec un outil interactif et ludique pour intriguer les passants, et notamment les jeunes (un fablab mobile et une table musicale), et ainsi les inviter à participer à ses recherches. Ils leur ont proposé une offre d’emploi pour être assistant-e de recherche sur ce projet. Onze personnes ont accepté. Par ailleurs des étudiant.es du Master MISS ont été mobilisé.es.

Cette enquête a permis de collecter 52 récits d’habitant-es. Ces entretiens ont été synthétisés et partagés en équipe à l’oral pour une analyse collective, les assistant.es enquêteurs et enquêtrices n’étant pas tous à l’aise avec la lecture. Ils ont aussi été codés afin de tester les hypothèses des participant.es (utilisation de la méthode des “narrations quantifiées”). 

“Être dans un quartier, c’est devoir faire preuve de plus de persévérance”

Après de nombreux échanges et une analyse des discours, les jeunes enquêteurs-trices et les chercheuses ont abouti aux conclusions suivantes : 

• “Être dans un quartier, c’est devoir faire preuve de plus de persévérance”. Cette nécessité de persévérance n’est pas liée au fait de naître au Mirail, mais de ne pas réussir à en partir. 
• Cette persévérance fait face à de fortes déceptions, avec l’impression d’assignation à des rôles et des emplois précaires, et un enchaînement d’échecs. D'après leurs mots, ils ne peuvent espérer que “le canapé ou rien”. 
• Les difficultés intrafamiliales ont également un impact fort sur les trajectoires. 

Les jeunes ont également participé à la recherche de solutions, proposant, notamment, que les dispositifs d’accompagnement deviennent un droit, sans dépendre d’une évaluation ou d’un jugement. Ou encore d’aider les parents en proposant des réunions non stigmatisantes, à domicile, pour réfléchir à l’orientation de leurs enfants. Et enfin de faire connaître les trajectoires collectées pour aider les parents, les professionnel.les de l’emploi et toutes les personnes concernées, jeunes et moins jeunes, à mieux comprendre comment se construisent des cheminements professionnels. 

C’est dans cette optique qu’un jeu de plateau a vu le jour, visant à faire s’exprimer les habitant-es sur ce sujet, grâce à la collaboration entre les sociologues, les designers et les makers. 

Un jeu de plateau pour discuter des trajectoires professionnelles

L’atelier se poursuit avec une démonstration du jeu conçu par Nathalie Chauvac. 

Celui-ci consiste à donner le début d’une trajectoire d’une personne (véritable histoire mais anonymisée), les joueurs devant imaginer la suite. En fonction des réponses, les joueurs obtiennent les jetons “bingo”, “sur la bonne voie” ou “fausse route”. “Elle ne va pas bouger de Toulouse si son père est malade” remarque un participant. “Peut-être que quelqu’un va lui parler des bourses possibles ?” suggère une autre. 

Ces discussions sont très révélatrices des représentations des uns et des autres. 

Ce jeu a été testé dans plusieurs lieux au Mirail, avec des élèves à partir de la 3e, des adultes en recherche d’emploi, mais aussi avec et par des conseillers et conseillères en insertion (d’orientation scolaire, de missions locales…).

Ces derniers ont constaté un fort intérêt des jeunes pour l’utilisation du jeu, qui est à la fois ludique tout en permettant de prendre du recul sur sa propre situation. 

Ce projet de recherche participative est aujourd’hui toujours en cours, et est entré dans une seconde phase mobilisant les acteurs clés de l’insertion professionnelle, au niveau de la Haute Garonne. 

Découvrez à travers cette vidéo un retour détaillé sur le projet : 

Pour échanger avec l'intervenante : 

• Nathalie Chauvac, Sociologue à SCOOL, membre du Laboratoire Interdisciplinaire Solidarités, Sociétés, Territoires (LISST-CERS) et maîtresse de conférence associée à l’Université Toulouse Jean Jaurès : nathalie.chauvac@scool.coop

Ressource pour en savoir plus : 

• Les projets de SCOOL
• Publication sur la première partie du projet 

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