Des actions dans les Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville - Retour sur le Forum Régional Sciences et Société 2024

Publié par Echosciences Occitanie, le 21 janvier 2025   1

Le Forum Régional Sciences et Société réunit chaque année une centaine d’acteurs et actrices impliqués dans le dialogue sciences-société en Occitanie afin de se rencontrer, de partager des expériences et imaginer des projets communs. L’édition 2024 portait sur le thème “Inclusion et lutte contre les inégalités” qui s’est décliné à travers 14 ateliers thématiques. 

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Retour sur l’atelier “Comment faciliter le déploiement de nos actions sur les Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville ?”

Qu’apporte la médiation de proximité aux habitant-es et structures des Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville (QPV) ? Et à nous-mêmes ? Comment répondre aux attentes des résident-es ? Quels partenariats et médiations imaginer ? Quels leviers pourrait-on activer collectivement dans les années à venir ?

A l’occasion des ateliers du Forum, une vingtaine de participant-es ont souhaité en discuter avec Élodie Pignol, Directrice de la culture scientifique, technique et industrielle à Toulouse Métropole, Arnaud Vedrenne, Co-Responsable de l’antenne Haute-Garonne Les Petits Débrouillards Occitanie, et Charline Petit, Responsable de projets médiation et transition écologique à la Régie de Quartier Desbals Services, venus témoigner de leurs expériences.

Arnaud Vedrenne a ouvert les discussions en redonnant la définition des Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville : nous parlons ici des bassins de population pour lesquels les indicateurs de pauvreté sont plus importants qu’ailleurs. Les inégalités y sont prégnantes. Les pouvoirs publics vont alors définir des zones prioritaires, nécessitant des actions spécifiques afin de réduire le taux de chômage, favoriser l'éducation ou encore la culture. Un cadre (nommé “Contrat de Ville”) est alors mis en place entre l’Etat, les collectivités et les partenaires locaux. Le dernier vient d’être signé pour une durée de 6 ans.

L’une des raisons d’être de l’association Les Petits Débrouillards est d’aller à la rencontre des citoyennes et citoyens, et plus particulièrement des personnes faisant face à des inégalités sociales. Leurs équipes interviennent donc quotidiennement au sein des QPV, proposant “des animations de rue, au pied des immeubles”. Pour cela, ils s’appuient sur les personnes du territoire, les acteurs locaux, et s’appliquent à s’intégrer à la vie de quartier.

Arnaud confie que, souvent, les résident-es s’imaginent ne pas être “la bonne cible” de la culture scientifique et technique. Ils ne se dirigeront pas vers les structures telles que des musées scientifiques. Il faut donc aller à leur rencontre. Car, finalement, sur place, ils expérimentent, se prennent au jeu, s’intéressent et prennent plaisir aux activités. Il faut néanmoins rester humble, et ne pas s’attendre à beaucoup de participants dès le lancement d’un projet. Souvent, on débute avec très peu de monde.

C’est au tour de Charline Petit, de Desbals Services, de partager son expérience. Desbals Services est une “régie de quartier” des quartiers de Bagatelle, La Faourette, Papus, Tabar et Bordelongue à Toulouse, proposant des services aux entreprises et habitant-es. Réalisation de petits bricolages, accompagnement aux démarches en ligne, entretien de locaux… Charline a travaillé avec les Petits Débrouillards afin de construire des activités pour un quartier, répondant à des besoins identifiés. Elle confirme l’intérêt des habitant-es pour les sciences, mais le choix des thèmes abordés a son importance. Elle a notamment travaillé sur les questions environnementales et le thème de l’alimentation.

Elle l’affirme : des structures scientifiques/culturelles et des acteurs locaux travaillant main dans la main est un vrai plus. Ces partenariats sont vus d’un bon œil, génèrent confiance, légitimité et mutualisation de connaissances. S’appuyer sur des structures locales permet aussi de mieux communiquer auprès des résident-es, avec une information et une diffusion plus adaptées.

“Ce n’est pas parce que c’est en QPV que cela doit être moins beau qu’ailleurs !”

L’atelier de discussion se poursuit avec le témoignage d’Élodie Pignol sur les actions de Toulouse Métropole. Cette dernière est l’une des rares collectivités en France à disposer d’une direction dédiée à la culture scientifique, technique et industrielle. Le service pilote et coordonne l'événement Un Dimanche au bord du lac, organisé depuis 12 ans au cœur d’un QPV. L’évènement s’est étoffé avec les années, et mobilise aujourd’hui de nombreuses structures locales, dont l’ensemble des équipements de culture scientifique de la métropole : le Quai des Savoirs, le Muséum d’Histoire Naturelle, la Cité de l’Espace et l’Envol des pionniers. Un partenariat étroit a été mis en place avec l’Université de Toulouse afin de mobiliser les acteurs de la recherche. Le festival s’inscrit aujourd’hui au sein de la programmation de la Fête de la science.

Élodie Pignol précise qu’il s’agit d’apporter un contenu robuste, dans une démarche conviviale et ludique. L’accent est mis sur l’interdisciplinarité, l’approche arts et sciences et l’émotion.

Un Dimanche au bord du lac a ainsi pour but de proposer un festival de culture scientifique aux habitants et habitantes du quartier de la Reynerie ainsi que de la Métropole. Il s’agit aussi de valoriser le quartier, en faisant venir des publics de tout Toulouse (et ses environs). Pour cela, un travail de fond a permis de co-construire l'événement avec les associations et les structures de ce quartier. “Une collectivité ne peut pas arriver avec ses gros sabots !” La manifestation est complétée désormais de toute une programmation d’activités durant l'été, afin que la démarche s’intègre dans la durée, entre dans le quotidien des habitant-es, et ne soit pas juste ponctuelle. Une grande fresque collective, réalisée par tout un groupe de résident-es de tous âges, est même encore projetée sur les murs d’immeubles. Le résultat est là : la fréquentation d’Un Dimanche au bord du lac augmente chaque année, et la proportion de personnes vivant dans quartier aussi.

Les discussions se poursuivent avec les participant-es qui évoquent d’autres exemples. Notamment des repas-débats en Maisons de chômeurs, invitant à partager un repas avec un-e scientifique et discuter sur divers sujets sciences-société.

Autre action possible : la végétalisation des sols et des animations de sensibilisation à l’importance de biodiversité locale.

Les participant-es évoquent aussi les appels en cours pour réoccuper les espaces qui étaient utilisés comme points de deal. “Il faut redonner envie aux enfants et aux gens de descendre de chez eux, ce qu’ils ne font plus dans certains endroits, car ils ont peur en raison des trafics illégaux” partage l’une des personnes présentes.

Une autre difficulté reste dans l’identification des projets existants, afin de s’y intégrer. Comment mettre en visibilité l’existant, notamment pour permettre à des scientifiques de s’y associer. L’une des solutions est d’aller à la rencontre des directions et chef-fes de projets des Mairies de quartiers.

Des participant-es ont aussi constaté que les publics qui viennent aux activités sont en grande majorité des femmes et leurs enfants. Il serait donc intéressant de construire des actions pouvant attirer aussi des hommes, des adolescent-es, et des jeunes adultes.

L’atelier s’achèvera donc sur le point essentiel rappelé plusieurs fois : co-construire avec les structures des quartiers !

L’atelier résumé en 4 conseils :

  • S’appuyer sur les structures de territoire qui connaissent les publics, co-construire le projet, et ne jamais venir avec un projet tout fait.
  • S’inscrire sur la durée, de manière régulière.
  • Proposer la même qualité qu’ailleurs.
  • Être dans la rencontre pour créer une culture commune.

Et 3 points de vigilance :

  • Faire attention à la posture qui ne doit jamais être descendante (“Je vais apporter de la connaissance”), mais horizontale avec la population.
  • Ne pas miser sur une forte mobilisation des habitant-es dès le début.
  • Ne pas sur-anticiper les attentes des publics et ne pas arriver avec des idées préconçues : demander aux acteurs locaux.

Pour aller plus loin :

Pour échanger avec les intervenants :

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