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Les parrains de la présidentielle

Publié par Mondes Sociaux, le 17 septembre 2024   79

Article de Julien Audemard, Michel Catlla et David Gouard

Pour présenter sa candidature à l’élection présidentielle, les candidats doivent obtenir le parrainage d’élus de la République. Mais qu’est-ce qui conduit ces derniers à soutenir ou non un candidat ? Comment peut-on expliquer notamment le refus du parrainage, en particulier chez les maires des petites communes ?  

Le parrainage des candidats à l’élection présidentielle française fait partie des sujets marronniers de la politique française. Ce moment particulier vient pourtant interroger les rapports complexes entre vie politique nationale et vie politique locale, notamment parce que les candidats à l’élection présidentielle ont besoin de parrainages d’élus, souvent locaux. 42 000 élus sont ainsi habilités à parrainer. Identifier les caractéristiques sociales et politiques des élus les prédisposant au parrainage, ainsi que leurs motivations à choisir de parrainer ou non apparaît ainsi crucial pour comprendre ce qui se joue en amont de l’élection phare du système démocratique français.

Le système de parrainages

La France n’est pas la seule démocratie parlementaire en Europe à mettre en œuvre un dispositif de filtrage des candidatures à l’élection présidentielle par le biais du soutien d’élus. L’objectif du législateur consiste à la fois à limiter le nombre de candidats en lice, à exclure les candidatures qui remettraient en cause la dignité du scrutin et à garantir la clarté du processus électoral.

Les parrainages des candidats à l’élection présidentielle existent en France depuis 1962. Depuis 1981, le nombre de parrainages requis pour se présenter a été ainsi rehaussé de 100 à 500. En 2016, une loi organique a rendu obligatoire la publicité intégrale de la liste des élus ayant parrainé les différents candidats. Pour autant, le nombre et la part d’élus parrainant un candidat n’ont guère diminué. En 2022, le Conseil constitutionnel a ainsi enregistré 13 427 parrains, soit environ 32 % des élus habilités à parrainer. Différentes catégories d’élus bénéficient de ce droit, parmi lesquels les parlementaires (députés, sénateurs et députés du Parlement européen), les conseillers régionaux et départementaux et enfin les maires, qui forment à eux seuls 83 % de ce vivier d’élus.

La période de dépôt des parrainages s’apparente à un moment exceptionnel où se donnent à voir les rapports, parfois contrariés, entre deux mondes politiques distincts. Les parrainages mobilisent, d’une part, le politique au niveau national marqué par la centralité de l’élection présidentielle en ce qu’elle suscite l’intérêt d’une majorité de citoyens, des principaux acteurs du monde médiatique et, surtout, en ce qu’elle met en action l’ensemble des partis politiques nationaux. La campagne des parrainages mobilise, d’autre part, le politique au niveau local, lequel fonctionne selon des logiques très spécifiques. Constituant l’immense majorité des élus français, les acteurs qui évoluent au niveau politique local sont infiniment moins professionnalisés que les élus nationaux. Contrairement aux élus régionaux, voire départementaux, ils ne sont pas, pour la plupart d’entre eux, membres d’un parti politique. Le paradoxe du système des parrainages des candidats à l’élection présidentielle française tient donc au fait qu’il ne peut raisonnablement fonctionner sans le concours d’une importante partie d’élus, maires de petites communes, qui n’entretiennent qu’un rapport distant aux partis et au niveau politique national.

Interroger la diversité des rapports que les différentes catégories d’élus entretiennent à l’égard du parrainage est ainsi crucial pour comprendre le fonctionnement de notre démocratie.[...]

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Crédits : Illustration d’Adèle Huguet pour Mondes Sociaux : licence CC BY-NC-ND / Flaticon, Freepik, Arslan Haider, iconic panda