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Enfin une nouvelle psychiatrie ?

Publié par Mondes Sociaux, le 29 janvier 2025   27

Article par Julie Daugé

La psychiatrie peut-elle être pratiquée sans intégrer les patients et leurs conceptions du rétablissement ? Dans les années 70, un mouvement contestataire américain remet en question la dominance des institutions psychiatriques et leurs compétences à « soigner » les personnes ayant des troubles psychiques. D’abord porté par les patients, puis récupéré par les professionnels de la psychiatrie, il aura fallu 50 ans pour voir émerger un dispositif de co-construction qui intègre les malades au fonctionnement hospitalier. Comment s’est opérée cette évolution ? C’est ce qu’Audrey Linder, sociologue de la santé, a cherché à comprendre.

Dans son article, Audrey Linder s’intéresse à la naissance du concept de « rétablissement » aux États-Unis et ses retombées en Suisse Romande. Son enquête, à base d’entretiens, d’observations et d’analyse de textes et publications, révèle comment les engagements militants nord-américains ont été adaptés au fil du temps.  

Au début, une lutte des patients de la psychiatrie…

À travers leurs revendications, un mouvement constitué de patients et ex-patients de la psychiatrie, souhaite transformer les pratiques et les perceptions de la maladie mentale. Leurs revendications consistent à vouloir changer les pratiques déshumanisantes, améliorer l’accès aux droits pour les malades et interdire l’hospitalisation sous contrainte. La dynamique américaine se cristallise autour du concept de « rétablissement » et pose la question de la place des patients dans leur propre processus de « guérison ».

La notion de « rétablissement » est un élément majeur car elle renvoie aux compétences des malades eux-mêmes et à leurs capacités individuelles. Le rétablissement suppose que les personnes sont certes malades mais qu’elles peuvent aussi être maîtresses de leurs parcours thérapeutiques. Plus encore, c’est un processus réflexif qui place la personne malade comme experte, relativisant les savoirs scientifiques des psychiatres. Avec l’idée de rétablissement, il n’est pas question uniquement de l’évolution de la maladie mais aussi du sentiment de bien-être et de l’importance de la qualité de vie des patients.

À partir de la fin des années 70, certains malades militent donc pour faire changer les mentalités. À travers plusieurs publications, dans des revues habituellement réservées aux professionnels, les usagers retranscrivent leur vécu, leur processus de « guérison » ou leurs espoirs. Loin des stéréotypes, ces témoignages « en première personne » démontrent qu’il est possible de se rétablir autrement que par l’institution psychiatrique. L’entraide et le développement du pouvoir d’agir des personnes sont notamment mis en avant et incarnent une nouvelle manière de vivre avec le handicap. Néanmoins, l’image d’une communauté de malades qui s’affranchissent des professionnels et des scientifiques ne convainc pas toutes les personnes concernées.[...]

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Illustration d’Adèle Huguet pour Mondes Sociaux : licence CC BY-NC-ND
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