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Des robots très patients

Publié par Université de Montpellier UM, le 31 mai 2016   3.6k

Comment permettre aux professionnels de santé de faire leurs premières armes ? A la Faculté de médecine de Nîmes, les soignants apprennent ou perfectionnent les gestes de leur métier, sans faire courir le moindre risque à leurs patients…

« Elle a vraiment très mal docteur, ça n’est pas normal faites quelque chose ». La tension est palpable dans la salle d’accouchement où Noëlle est sur le point d’avoir son quatrième enfant. Après trois naissances sans soucis, elle a choisi d’accoucher sans péridurale. « Docteur qu’est-ce qu’il se passe, c’est long non ? Il y a un problème ? ». Le stress du papa augmente. La tête du bébé est déjà sortie, mais son corps reste coincé. Diagnostic : dystocie des épaules. Une situation d’urgence qui nécessite une réaction immédiate de l’équipe soignante. L’interne, la sage-femme et l’aide soignante qui s’affairent autour de Noëlle n’ont que quelques minutes pour extraire le bébé.

Situations d’urgence

Deux étages plus bas, Istan, un jeune homme de 30 ans, est sur le point d’être opéré de l’appendicite. Une opération banale. Les anesthésistes l’endorment avant de le laisser entre les mains des chirurgiens, la routine. Mais soudain l’écran du moniteur de surveillance s’affole : la quantité de CO2 expirée par le jeune homme augmente anormalement et sa température monte en flèche. Istan fait une hyperthermie maligne, une réaction à l’anesthésie rare et qui peut être mortelle. Pour sauver Istan, les anesthésistes doivent lui administrer le traitement adéquat le plus vite possible…

Une journée banale dans un hôpital ? Pas tout à fait. Nous ne sommes pas dans un hôpital. Et Noëlle et Istan ne sont pas des patients comme les autres. Ce sont… des robots. Bienvenue à la plateforme de simulation de la Faculté de médecine de Nîmes. Baptisée SimHU Nîmes pour Simulation Médicale Hospitalo-Universitaire, cette structure exceptionnelle permet aux étudiants en médecine et autres professionnels de santé de se former sans risques à des gestes médicaux délicats.

« Elle permet également aux professionnels en activité de rester au meilleur niveau en se confrontant à des situations exceptionnelles », souligne le professeur Michel Prudhomme, coordonnateur de la plateforme de simulation. « Ces séances de simulations leur apprennent non seulement à améliorer leur savoir-faire, mais surtout leur savoir-être », confie l’initiateur de ce projet. Gérer une situation de crise, contrôler son stress et ses émotions, savoir s’organiser efficacement en équipe : autant de compétences tout aussi vitales que les gestes médicaux.

Simulation hyperréaliste

« Les simulations obligent les médecins à se remettre en question et à s’interroger sur leurs pratiques professionnelles », confirme le docteur Lana Zoric, responsable scientifique des simulations en anesthésie. L’hyperthermie maligne d’« Istan », c’est elle qui l’a programmée. « Nous préparons les scénarios à l’avance et nous les faisons évoluer en temps réel, c’est très stressant pour les anesthésistes ». Très stressant aussi pour l’équipe qui s’est occupée de « Noëlle ». Dans la salle d’accouchement l’interne, la sage-femme et l’aide soignante en auraient presque oublié que leur patiente n’est pas tout à fait comme les autres. « On le vit comme un vrai accouchement », confie Marie-Pascale Villette. La jeune sage-femme a déjà pratiqué des accouchements mais n’a jamais eu à prendre en charge une dystocie des épaules. « Au moins maintenant je sais à quoi m’attendre et je réagirai mieux en situation réelle. Cette simulation me permet d’être une meilleure sage-femme ». En faisant les bons gestes mais aussi en optimisant le travail en équipe. « Chaque séance de simulation est suivie d’un débriefing où l’on parle de ce qui a été fait et de ce qui aurait pu être amélioré, un temps d’échange indispensable pour réfléchir ensemble », explique Valérie Courtin, responsable pédagogique et scientifique de la plateforme pour la maïeutique.

Un gage de sécurité pour les patients

En plus de Noëlle et d’Istan, la Faculté de médecine de Nîmes dispose également d’un robot de nouveau-né. Des mannequins déjà passés entre les mains de dizaines de sages-femmes, de puéricultrices, d’aides-soignantes, de pédiatres, d’urgentistes et d’anesthésistes-réanimateurs. Et ce n’est pas tout, « la plateforme de simulation possède également un laboratoire d’anatomie qui permet aux chirurgiens, radiologues ou encore kinésithérapeutes de peaufiner leurs techniques ». Ici point de robots high-tech : les étudiants et médecins s’entrainent sur des corps humains provenant de personnes ayant fait don de leur corps à la science. Ils peuvent aussi effectuer des opérations sur des modèles porcins, animal qui présente le modèle physiologique le plus proche de l’homme. « Cette plateforme est l’une des plus complète de France, souligne Michel Prudhomme, l’ensemble de ces outils de simulation permet aux médecins de rester à un excellent niveau, mais également de se former à des techniques novatrices sans risque pour le patient ».

L’accouchement de Noëlle se termine. Tout s’est bien passé, l’équipe médicale soulagée brandit un bébé robot en grande forme. Istan de son côté a pu être sauvé grâce au sang-froid et à la rapidité de réaction des anesthésistes. C’est vrai que ça rassure.


Retrouvez cet article dans LUM, le magazine science et société de l'Université de Montpellier.

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