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Une étude franco-brésilienne révèle la distribution spatiale des poissons autour de Fernando de Noronha

Publié par IRD Occitanie, le 7 juin 2022   880

Une équipe de scientifiques français·e·s et brésilien·ne·s ont étudié de manière exhaustive et continue la distribution spatiale des poissons autour de Fernando de Noronha, archipel océanique au large de la côte du Nordeste brésilien, une première dans une zone tropicale. Outre l’intérêt pour la compréhension des écosystèmes marins tropicaux, parmi les plus riches en biodiversité, ce travail apporte des éléments concrets d’aide à la décision pour une planification de l’espace marin qui prenne en compte les divers usages.

Si beaucoup connaissent l’archipel de Fernando de Noronha, à environ 350 km de la côte brésilienne, comme un haut lieu de la biodiversité marine, la distribution dans l’espace de cette biodiversité n’avait pas encore été étudiée. C’est maintenant chose faite grâce à une équipe du Laboratoire Mixte International (LMI) Tapioca qui, en combinant méthodes acoustiques et vidéos sous-marines, en a obtenu une vision exhaustive et continue dans l’espace. « Cette combinaison de méthodes est connue, mais elle n’avait pas encore été appliquée dans un environnement marin tropical. […] Par rapport à d’autres, notamment le prélèvement d’individus, elle est très peu intrusive » explique Arnaud Bertrand qui co-signe l’article.

Une des nouveautés de l’étude est de s’être intéressé aux poissons plutôt qu’aux premiers maillons de la chaîne trophique – le phytoplancton et le zooplancton – comme la plupart des travaux réalisés jusque-là. C’est ainsi que les scientifiques ont observé une distribution asymétrique des populations autour de l’archipel : la partie au vent s’est révélée plus poissonneuse que la partie sous le vent. « C’est un résultat assez contre-intuitif, notamment en tenant compte de l’Island Mass Effect (IME) » note Julie Salvetat, première autrice de l’article. La notion d’IME fait référence aux effets de la turbulence créée par la rupture topographique que constitue une île : la pente modifie la dynamique des courants océaniques et provoque la remontée d'eaux modérément profondes, riches en nutriments, dans les couches plus superficielles ; cela renforce la production primaire et donc le volume de nourriture dans la partie sous le vent, donnant à penser qu’une plus grande quantité de nourriture attirerait les organismes. Or, c’est bien le contraire qui est observé, un résultat qui pourrait avoir des implications au niveau de la connaissance globale des îles océaniques : « Fernando de Noronha est une île océanique tropicale assez 'typique'. Donc cette distribution asymétrique des poissons, mais aussi d’autres phénomènes observés, pourraient être applicables à d’autres environnements similaires » souligne Arnaud Bertrand.

L’autre intérêt de l’étude concerne l’aide à la décision. À Fernando de Noronha, l’écosystème marin fournit des ressources pour la pêche artisanale et le tourisme, deux usages de l’espace qui se superposent. En offrant une meilleure connaissance de la distribution spatiale des poissons dans l’archipel, la publication donne des outils pour engager, avec l’ensemble des acteurs impliqués, un dialogue qui combine la préservation de la biodiversité et activités économiques basées sur l’exploitation raisonnée et durable de l’océan.

Figure de la distribution des poissons autour de Fernando de Noronha © Julie Salvetat et al.

Cette étude a été réalisée par le LMI TAPIOCA (IRD, UFRPE, UFPE). Les données ont été récoltées lors des campagnes FAROFA (Fish Acoustics aROund Fernando de NoronhA) réalisées entre dans l'archipel entre 2017 et 2019.


Publication

“Comprehensive spatial distribution of tropical fish assemblages from multifrequency acoustics and video fulfils the island mass effect framework” in Scientific Reports

Julie Salvetat, Nicolas Bez, Jeremie Habasque, Anne Lebourges-Dhaussy, Cristiano Lopes, Gildas Roudaut, Monique Simier, Paulo Travassos, Gary Vargas, Arnaud Bertrand

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